Grosse division sur les gilets jaunes cette semaine à gauche. Est-ce qu’on a envie de sacrifier la transition écologique au nom du pouvoir d’achat ? J’étais assez inquiet en entendant parler ça et là de « poujadisme », de « beaufs en gilets jaunes »… Disons que la gôche urbaine qui fait mine de ne pas comprendre que tout le monde n’a pas un arrêt de métro ou de tram à 100 mètres de chez lui me navre autant que les gilets jaunes qui se fendent d’une petite sortie de route raciste ou qui mettent la misère à un pigiste qui gagne parfois moins que le SMIC.
On ne va pas se mentir, je l’ai eu aussi cette tentation de mépris. Puis je me suis rappelé qu’avant d’habiter à Strasbourg-hypercentre et de laisser ma bagnole rouiller dans un garage, j’ai fait quelques mois de stage en presse locale. Dont un où j’habitais à 15 minutes de mon lieu de travail, et où je payais l’essence de ma poche pour m’y rendre.
Il faudrait que j’ai la mémoire bien courte pour ne pas me rappeler que le budget essence de certains, c’est quasiment un deuxième loyer et que c’est une charge incompressible. Pour eux 6 centimes à la pompe, ça compte.
C'est un très mauvais calcul de mépriser ce mouvement. On a déjà laissé l'extrême-droite s'installer sur la laïcité, maintenant, on va aussi lui laisser le pouvoir d'achat ? Il y a un nombre incalculable de bouquins qui expliquent qu'on ne pourra pas réussir une transition écologique sans corriger les inégalités de richesse, de race, de genre... Je pense au contraire que c'est tout à fait possible, et qu'on en prend le chemin. L'exemple du diesel taxé pendant que le kérosène des avions est épargné, en est un exemple. On appellerait ça le capitalisme vert, et ça serait terrible. Garder son mode de vie actuel serait un privilège de riche. Les plus aisés pourront choisir un véhicule électrique (pas moins problématique aujourd'hui hein. Coucou le bilan carbone à la fabrication et la dépendance au nucléaire), manger bio, se payer un petit havre de paix à toute épreuve des aléas climatiques... Ceux qui s'adapteront le mieux au changement climatiques, et qui pourront même peut-être se payer le luxe de polluer encore, seront les plus riches. C'est ça le message envoyé par la transition écologique à la sauce Macron. Les autres n'ont qu'à se démerder.